Sophie Fardella

“Ce que nous serons n’a pas encore ete manifeste”

1er Epitre de Jean 3,2

 

L’oeuvre est une zone de deambulation entre l’ici et un ailleurs

incertain. C’est un espace de croisement entre un passe, un

present et un eventuel futur ou s’opere ce lien precieux entre

Origine et Adoption propre a la Mutation. Ce deplacement

qu’execute l’artiste, dans le temps et l’espace, est une force

liberatrice au sein meme de la creation. Ainsi, pour qui a acces

a cette dimension et sait l’exploiter en ne restant pas rive a son

origine comme a la rive d’un passe perdu a tout jamais, fera

oeuvre originale.

Acceptons les allers et retours entre les langues, les cultures,

les histoires, les langages plastiques permettant de creer ces

ruptures, ces dislocations fertiles, ces formes hybrides neuves et

seduisantes. La creation ne devrait-elle pas etre qu’etrangete ?

Il est evident que le role de tout createur est de mimer non pas

ce qui existe deja, mais de se servir du passe avec respect pour

inventer ce qui pourrait eventuellement etre.

Voila une sorte d’alienation dont on ne peut nier la noblesse et

la fecondite a nulles autres pareilles. Cette inquietante etrangete

qui nous habite, elle, est pour ainsi dire “la face cachee de notre

identite”. Tout en transportant avec lui son histoire, l’artiste est

oblige de se reinventer pour faire oeuvre. Tel un explorateur, il

renonce a ce qu’il connait deja et ce qui lui a deja ete prouve pour

sortir d’un temps sterile et s’ouvrir au temps indefini voire infini

de la creation . C’est toute sa raison d’etre.

 

Sophie Fardella